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Extrait de l'éditorial de Joseph Macé-Scaron :
"Pourquoi Gide ? Pourquoi revenir à Gide, aujourd’hui ? L’actualité littéraire est comme la lumière du jour. Elle éclaire les surfaces mais ne pénètre pas très avant dans la mer des oeuvres. Or les profondeurs de cette dernière sont ténébreuses, ce sont des abîmes immenses qu’il faut, de temps en temps, draguer afin de ramener à la surface ces animaux étranges que nous nommons les classiques. Ils ont été baptisés ainsi parce que nous les imaginons aveugles à la modernité. Ils ne pouvaient pas, ils ne devaient pas voir. Pourtant, si on prend la peine d’examiner ces monstres des profondeurs, l’on constate, avec stupeur, que certains ont des yeux; qu’ils en ont presque tous, sans compter, parfois même en sus, des antennes, des capteurs d’une sensibilité prodigieuse. Et si nous étions précisément, nous-mêmes, aveugles ? Cette image des créatures des abysses est empruntée à Gide, qui écrit dans Les Faux-monnayeurs: «On veut douter encore ; on s’émerveille: pourquoi des yeux, pour ne rien voir? des yeux sensibles, mais sensibles à quoi?... Et voici qu’on découvre enfin que chacun de ces animaux, que d’abord on voulait obscurs, émet et projette devant soi, à l’entour de soi, sa lumière. Chacun d’eux éclaire, illumine [...].» Cette lumière qui émane de l’oeuvre de Gide ne cesse d’émettre. Elle nous incite en permanence à chercher la vérité et non à la trouver. C’est aussi en cela que l’auteur de Paludes demeure le plus moderne de nos classiques."
Au menu de ce "dossier Gide" :
p. 66 Gide, le plus moderne des classiques dossier coordonné par J.-C. Perrier et François Aubel
p. 69 « Il a annoncé le Nouveau Roman et l’autofiction », entretien avec Hugues Pradier
p. 70 Les fausses monnaies du moi, par Bernard Fauconnier
p. 73 Le Ramier, oiseau rare, par Jean-Claude Perrier
p. 74 « Inquiéter, tel est mon rôle », par Alain Goulet
p. 76 La cathédrale des contradictions, par Pierre Masson
p. 78 Le cachet de la poste ne faisant pas foi, par Pierre Lachasse
p. 80 Quand Nathanaël écrivait à M. Teste, par Martine Sagaert
p. 82 Un infatigable passeur, par Jean-Claude Perrier
p. 84 Entre Joyce et Staline, il a vite choisi, par Adrien Le Bihan
p. 86 Bibliographie