Pierre Masson, Jean-Pierre Prévost,
André Gide-Oscar Wilde. Deux immoralistes à la Belle époque
Editions Orizons, septembre 2016, 312 pages
23€, ISBN : 979-10-309-0092-7
Voilà un livre qui tombe à pic. Alors
que s'ouvre bientôt l'exposition Oscar Wilde, l'impertinent absolu au Petit Palais, Pierre Masson et Jean-Pierre Prévost
publient André Gide – Oscar Wilde. Deux immoralistes à la
Belle Époque (éditions Orizons). Nos amis nous ont parlé
depuis plusieurs années de ce livre qu'ils avaient écrit et qui ne
trouvait pas d'éditeur. Saluons donc le sens de la publicité
d'Orizons !
Il faut dire que devant le côté
« fatras » de l'ouvrage, il y avait peut-être de quoi
prendre peur. Et un véritable éditeur aurait sans doute mis bon
ordre dans cette accumulation d'éléments thématiques, de chapitres disparates, d'illustrations pas toutes utiles ni très bien choisies, le
tout en marge du récit principal... (Sans parler de l'affreuse
couverture, de la titraille déconcertante ou des numéros de notes
décalés...) Les auteurs renoncent heureusement assez tôt à
vouloir dresser le portrait de l'époque pour se centrer sur la
chronologie, ici capitale.
Les deux derniers tiers, appuyés sur
des extraits de la Correspondance de Gide et ses souvenirs ou
ceux de ses proches, en se concentrant précisément sur Gide,
montrent très bien comment ce dernier va recomposer un Wilde à sa
façon, et, ce faisant, intégrer leurs brèves rencontres et la
silhouette de Wilde dans différents récits. Ou encore comment ce
que les auteurs nomment « l'épisode crucial d'Alger »,
va être lui aussi réinventé et réinjecté dans l'œuvre.
Il faut donc dépasser le côté un peu
raté de la forme, qui risque de faire trébucher le lecteur à tout
instant, pour s'attacher au texte et au fond tous deux très
intéressants. Le livre permet, par son analyse des prolongements
wildiens dans l'œuvre de Gide, de réévaluer les rapports entre les
deux écrivains : pour Gide, des rapports jusque là très surévalués
sur le plan personnel, et sous-estimés sur le plan littéraire...
2 commentaires:
En lisant la correspondance Gide-Louÿs-Valéry, j'ai eu l'impression que l'irruption de Wilde et de son homosexualité inmanquable dans la vie de Gide avait précipité ou consolidé (car de mémoire Gide était fatigué de Louÿs) la rupture Gide-Louÿs. Q'en pensez-vous, est-ce une impression gratuite ou avez-vous des éléments à ce sujet ?
Il y a effectivement des liens dans tout ça, probablement davantage chez Louÿs qui vient d'aller poser "la question de confiance" à Wilde en Allemagne et qui, à Alger, d'une certaine façon, en fait de même avec Gide en l'emmenant au bordel... Mais comme vous le suggérez, Gide en avait assez de Louÿs, de ses crises de jalousie, de sa passion pour les homosexuels suivie du rejet, de ses blagues de potache. Au moment où Louÿs, qui a dilapidé son héritage en bamboches, doit rentrer dans le rang s'il veut que son frère continue à lui donner de l'argent, Gide expérimente une nouvelle morale. Leurs chemins devaient se séparer.
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