Gide, après 1918, invente le personnage de l'intellectuel moderne, un rôle que Sartre et Foucault, entre autres, assumeront à leur tour d'après son exemple. Gide n'a ignoré aucun des grands courants de son siècle, symbolisme, naturalisme, dadaïsme, surréalisme, réalisme socialiste. Acteur majeur de la vie littéraire et intellectuelle pendant plus d'un demi-siècle, Gide a bien mérité le titre de « contemporain capital » qui lui a été décerné de son vivant.
Car Gide est bien l'adversaire de la société bien pensante qui l'a engendré à son dam. Or ce grand témoin, dont l'influence critique, voire révolutionnaire, n'a cessé de s'étendre, a été le maître à penser de plusieurs générations.
Ce second volume de sa biographie couvre les trente-trois dernières années de sa vie. C'est le Gide de la seconde maturité, dont l'influence déborde les frontières, un Gide omniprésent dans le débat public, qu'il s'agisse d'interroger les rapports entre religion et morale, de dénoncer les abus de la colonisation, d'exalter ou de critiquer le communisme soviétique, de prôner la liberté de l'individu face aux oppressions.
C'est à Gide que nous devons certaines de nos libertés, quelques-unes aussi de nos interrogations en matière de morale sexuelle, de tolérance religieuse, ou de dialogue entre les peuples et civilisations.
La leçon de Gide, soixante ans après sa mort, est plus que jamais actuelle.
Tamara Levitz, professeur de musicologie à l'Université de Californie à Los Angeles et spécialiste de la musique moderne, signe avec Modernist Mysteries: Perséphone une étude qui dépasse le champ de la seule exploration musicologique. S'attachant aux rebondissements qui entourent la première de Perséphone et aux rapports entre ses protagonistes (Gide, Stravinsky, Ida Rubinstein, Copeau...), l'auteur explorent les quatre thèmes importants du modernisme : la religion, la sexualité, la mort et la mémoire historique en art.
Présentation de l'éditeur :
Modernist Mysteries: Perséphone is a landmark study that will move the field of musicology in important new directions. The book presents a microhistorical analysis of the premiere of the melodrama Perséphone at the Paris Opera on April 30th, 1934, engaging with the collaborative, transnational nature of the production. Author Tamara Levitz demonstrates how these collaborators-- Igor Stravinsky, André Gide, Jacques Copeau, and Ida Rubinstein, among others-used the myth of Persephone to perform and articulate their most deeply held beliefs about four topics significant to modernism: religion, sexuality, death, and historical memory in art. In investigating the aesthetic and political consequences of the artists' diverging perspectives, and the fall-out of their titanic clash on the theater stage, Levitz dismantles myths about neoclassicism as a musical style. The result is a revisionary account of modernism in music in the 1930s.
As a result of its focus on the collaborative performance, this book differs from traditional accounts of musical modernism and neoclassicism in several ways. First and foremost, it centers on the performance of modernism, highlighting the theatrical, performative, and sensual. Levitz places Christianity in the center of the discussion, and questions the national distinctions common in modernist research by involving a transnational team of collaborators. She further breaks new ground in shifting the focus from "history" to "memory" by emphasizing the commemorative nature of neoclassic listening rituals over the historicist stylization of its scores, and contends that modernists captured on stage and in philosophical argument their simultaneous need and inability to mourn the past. The book as a whole counters the common criticism that neoclassicism was a "reactionary" musical style by suggesting a more pluralistic, ambivalent, and sometimes even progressive politics, and reconnects musical neoclassicism with a queer classicist tradition extending from Winckelmann through Walter Pater to Gide. Modernist Mysteries concludes that 1930s modernists understood neoclassicism not as formalist compositional approaches but rather as a vitalist art haunted by ghosts of the past and promissory visions of the future.
Voir aussi le très beau site de l'auteur.
En juillet dernier les Presses Académiques Francophones donnaient une nouvelle édition revue et augmentée (tout comme son prix !) de la thèse soutenue en 2000 par Christophe Duboile et publiée en 2002 à L'Harmattan : André Gide-André Ruyters : un dialogue littéraire (1895-1907). Contribution à l'histoire de la littérature francophone de Belgique. Présentation de l'éditeur :
André Ruyters (1876-1952) est une figure bien oubliée de la littérature européenne. Si l’on se souvient qu’il co-fonda La Nouvelle Revue française, c’est à peine si l’on sait encore qu’il fut aussi écrivain. Pourtant, de 1895 à 1907, ce Bruxellois, entré en littérature à dix-neuf ans, a entrecroisé ses œuvres à celles d’André Gide (1869-1951) pour donner naissance à un riche dialogue littéraire. Le présent ouvrage tente d'en mettre en évidence la singularité et d’en comprendre l’évolution, à la lumière de la correspondance échangée entre les deux hommes. Par sa triple approche textuelle, biographique et psychologique, il cherche à analyser le rôle que Gide a joué dans la formation de Ruyters écrivain, et dans le développement de ses œuvres. Cet essai se veut une contribution à la connaissance d’un auteur quelque peu oublié appartenant à une époque où la correspondance littéraire était particulièrement riche et vivante, et de l’histoire de la littérature francophone de Belgique au tournant du XXème siècle.
L'Association des Amis de Jean Giono a la bonne idée de donner une nouvelle édition de la Correspondance André Gide – Jean Giono, établie et annotée par Roland Bourneuf, Jacques Cotnam et Jacques Mény. Ce hors-série de la Revue Giono ajoute quelques lettres à la précedente édition devenue rare, tout comme les textes et documents donnés en annexe. Quatrième de couverture :
De 1929 à 1940, au moins, André Gide et Jean Giono ont entretenu, à l’initiative du premier, une correspondance fidèle, bien qu’irrégulière, dont témoignent quarante-trois lettres, cinq cartes et trois télégrammes publiés ici. (cela «sonne» étrangement, les deux participes sur le même plan). Cet échange épistolaire fut prolongé par plusieurs rencontres, à Paris, à Manosque ou sur la Côte d’Azur, la dernière d’entre elles ayant eu lieu en 1949 à Saint-Paul-de-Vence. Dix ans plus tôt, Gide avait consacré quelques pages (demeurées inédites du vivant des deux écrivains) à la défense Giono, arrêté à la déclaration de guerre. En 1951, à la mort de Gide, Giono a tenu, pour sa part, à lui rendre hommage dans La Nouvelle Revue Française. Ces deux textes sont repris à la suite de leur correspondance, augmentée d’autres lettres, textes et documents actuellement disponibles, dont certains inédits. S’y ajoute un inventaire de la bibliothèque gidienne de Giono, le tout constituant l’ensemble le plus complet jamais publié sur la relation et l’amitié entre André Gide et Jean Giono.
André Gide - Jean Giono, Correspondance 1929-1940
établie et annotée par R. Bourneuf, J. Cotnam et J. Mény
Association des Amis de Jean Giono, 2012
ISBN : 978-2-9529970-6-5, 12€
Toujours côté correspondances, signalons celle entre Francis Viélé-Griffin et Henri de Régnier, établie, présentée et annotée par Pierre Lachasse aux Editions Honoré Champion :
Ce volume réunit 575 lettres qui racontent la double histoire d'une amitié fraternelle née sur les bancs du collège Stanislas et d'une lutte poétique partagée en arrière-plan par la génération de 1885. La correspondance entre Régnier et Vielé-Griffin, commencée avant la vingtième année, possède la spontanéité de la jeunesse avec ses élans de révolte et de passion, ses anathèmes et ses palinodies. Elle constitue une véritable expérimentation de la littérature, témoignant de la genèse de leurs œuvres et de leur combat pour construire une poésie nouvelle fondée non plus sur la soumission à des dogmes immuables, mais sur la libération du vers. Le rythme des échanges épistolaires s'accélère l'été 1886 quand Vielé-Griffin choisit de séjourner chaque année de longs mois en Touraine, puis après la fondation des Entretiens politiques et littéraires (1890), dont le ton polémique et paradoxal contribue à la victoire des valeurs symbolistes. Il décroît après l'entrée de Régnier dans le milieu Heredia. En dépit de leur brouille survenue en 1900, leur amitié passionnée au service de la poésie demeure un merveilleux voyage en Arcadie dont les lettres que l'on va lire témoignent pour la postérité.
Henri de Régnier-Francis Vielé-Griffîn. Correspondance (1883-1900)
Édition établie, présentée et annotée par Pierre Lachasse,
ISBN 978-2-7453-2348-4, 1016p., 210€
(impossible de donner un lien direct vers la fiche du livre : le site de l'éditeur
est non seulement lamentable sur le plan technique mais aussi pratique.
Seule solution : une recherche avec l'ISBN puisqu'il ne connaît pas les auteurs...)
Nous aurons bien sûr l'occasion de revenir plus en détail sur certains de ces livres. En attendant rappelons, pour un tour d'horizon complet, les récentes parutions et rééditions autour des Faux-monnayeurs déjà évoquées ici ou la Correspondance André Gide - Paul Fort elle aussi déjà signalée là.
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