André Gide, l'Européen
Colloque international et pluridisciplinaire
Université de Haute-Alsace
Institut de Recherche en Langues et Littératures Européennes (ILLE - EA 4363)
Mulhouse, 16-18 mars 2016
Colloque international et pluridisciplinaire
Université de Haute-Alsace
Institut de Recherche en Langues et Littératures Européennes (ILLE - EA 4363)
Mulhouse, 16-18 mars 2016
Appel à communications
« Mais que sera l’Europe de demain ? demandez-vous », écrit Gide dans un article faisant suite à une enquête sur l’avenir de l’Europe lancée par la Revue de Genève : « l’Europe entière court à la ruine si chaque pays d’Europe ne consent à considérer que son salut particulier », répond-il, en soulignant pourtant dans la conclusion de son article que c’est tout d’abord « l’homme […] qu’il importe de réformer ». L’écrivain analyse avec précision la « question de l’Europe », cette portion du globe qui donne à voir « la fin d’un monde, d’une culture, d’une civilisation » et dans laquelle « tout doit être remis en question […], car les formes vieilles, explique-t-il dans le même article, ne peuvent convenir aux forces jeunes » (« L’avenir de l’Europe »). L’Europe est pour Gide un espace culturel « éminemment oscillant, dialectique » (Pascal Dethurens) et il invite à y réfléchir comme lui-même et nombre de ses contemporains le font (Claudel, Valéry, Romains, Artaud, pour n’en citer que quelques-uns), mais en gardant le regard toujours tourné vers l’avenir : « notre monde n’est pas encore perdu », affirme-t-il en 1937 dans sa préface à l’Avertissement à l’Europe de Thomas Mann, écrivain qui avait apprécié son article sur les rapports franco-allemands paru en 1921 dans La Nouvelle Revue Française. Il s’agit d’un texte dans lequel Gide fait référence à un article précédent d’Ernst Robert Curtius, son correspondant depuis 1920, et c’est justement dans une des lettres qu’il lui adresse, que Curtius souligne l’importance, pour la vie intellectuelle « de la France – et de l’Europe », de La NRF et des « questions de cosmopolitisme littéraire » soulevées par Gide.
En commentant ses textes littéraires dans un écrit de 1929, Klaus Mann, le fils de Thomas Mann, qualifie Gide de « grand Européen ». Éclectique et protéiforme, Gide est un écrivain qui s’est interrogé sur l’Europe tout au long de sa vie, sur son présent et son futur, sur sa culture et sa civilisation, réflexion constante et encore très actuelle dont les multiples ramifications se déploient transversalement tout au long de son œuvre : de ses études critiques à son œuvre fictionnelle, des pages de son journal à ses échanges épistolaires. Grand humaniste, membre fondateur et père spirituel de La NRF, Gide est un protagoniste capital de la vie intellectuelle de l’Europe de son temps, dont il vit avec un regard attentif les transformations et les événements qui la bouleversent (parmi lesquels deux Guerres mondiales et la montée des totalitarismes). De son vivant, son œuvre controversée traverse les frontières nationales et internationales, animant, déconcertant et enthousiasmant ses contemporains et influençant profondément les générations suivantes. Polyglotte et passionné de littérature étrangère, il suit de près les traductions de ses textes en allemand et anglais et s’engage aussi, lui-même, dans plusieurs traductions (de Blake, Pouchkine, Goethe, Rilke, ...). Sans compter sa passion du voyage qui tout au long de sa vie le mène à franchir sans cesse les frontières intérieures et extérieures de l’Europe.
Ces nombreuses facettes laissent transparaître l’un des aspects polyédriques de cet écrivain aux mille visages : « André Gide, l’Européen », à propos duquel ce colloque se propose de s’interroger. Dans une perspective pluridisciplinaire, ouverte aux réflexions relevant de domaines différents (littérature, linguistique, traduction, histoire, histoire des idées, etc.), ce congrès souhaite aussi explorer, selon une approche à la fois diachronique et synchronique, son enracinement dans l’espace culturel européen. Toute contribution visant à élargir la réflexion mettant en relation l’œuvre de Gide avec celle d’autres écrivains européens de son époque et de celles qui la précèdent ou qui la suivent, sera la bienvenue.
Nous proposons d’articuler la discussion autour des thèmes et des axes de réflexion suivants :
a) Thèmes de recherche :
- Gide et l’Europe ; Gide et la pensée européenne
- Gide et les écrivains européens ; Gide et les revues européennes
- Gide et la littérature européenne ; Gide et le roman européen
- Gide et ses correspondances européennes ; Gide et ses voyages
- Gide et ses traductions ; Gide et sa réception en Europe
1. Echanges et métaphores. Quel est le rapport entre l’Europe que Gide souhaite et celle qu’il observe et dans laquelle il vit ? En s’opposant à « l’infatuation isolante du nationalisme » (tel que celui de Barrès ou de Maurras), et prenant en même temps ses distances avec la « dépersonnalisation que voudrait l’internationalisme » (tel que celui de Barbusse ou celui de Rolland), vers quelle Europe tend-il ? Au fil des échanges entretenus par Gide à ce sujet, dont ceux avec Curtius étudiés par R. Theis, mais aussi au fil des métaphores par lesquelles cette problématique s’exprime (comme celle botanique de la « Querelle du peuplier » ou encore celle musicale des « Réflexions sur l’Allemagne »), quelle vision de l’Europe émerge ? Comment se place-t-elle dans le panorama européen ?
2. Général et particulier. Gide écrit : « Quoi de plus national qu’Eschyle, Dante, Shakespeare, Cervantès, Molière, Goethe, Ibsen, Dostoïevski ? Quoi de plus généralement humain ? Et aussi de plus individuel ? » (« Nationalisme et Littérature »). Tandis que dans « L’avenir de l’Europe » il affirme : « Je l’ai dit maintes fois et depuis bien longtemps déjà : c’est en étant le plus particulier qu’on sert le mieux l’intérêt le plus général ; et ceci est vrai pour les pays aussi bien que pour les individus. » Dans son œuvre, comment se croisent et s’expriment sa réflexion sur la nation et l’Europe, sur l’individu et la communauté, sur la littérature et la culture européenne ? En quoi ces questionnements aident-ils à comprendre l’humanisme de Gide et son rapport à la religion ainsi qu’à la politique ?
3. Réseaux, voyages et ouvertures. Dans quels milieux intellectuels et géographiques baigne « André Gide, l’Européen » ? D’une part, en France, il y a l’expérience de La NRF, revue qui donne voix à des écrivains dont les positions concernant la question de l’Europe sont très différentes (Suarès, Thibaudet, etc.) et qui encore aujourd’hui s’interroge sur ce sujet, comme le montre la parution en 2014 du numéro « Notre Europe », dirigé par Stéphane Audeguy et Philippe Forest. De l’autre, il y a ses voyages (réels ou imaginaires, accomplis ou échoués). Toujours en mouvement, Gide traverse l’Europe, tissant un dense réseau de relations, et la quitte aussi pour ses voyages en Afrique. Ces expériences, comment contribuent-elles à la compréhension de Gide, « l’Européen » ?
Comité scientifique : Robert Kopp (Université de Bâle), Pierre Masson (Université de Nantes), Martine Sagaert (Université du Sud-Toulon Var), Peter Schnyder (Université de Haute-Alsace), David H. Walker (Université de Sheffield), Jean-Michel Wittmann (Université de Lorraine).
Comité d’organisation : Peter Schnyder, Frédérique Toudoire-Surlapierre et Martina Della Casa (Université de Haute-Alsace).
Modalités de proposition : Les propositions (environ 300 mots), accompagnées d’une brève notice biobibliographique, sont à envoyer avant le 30 septembre 2015 à Peter Schnyder (peter.schnyder[at]uha.fr), Frédérique Toudoire-Surlapierre (frederique.toudoire[at]uha.fr) et Martina Della Casa (martina.della-casa[at]uha.fr).
Frais d’inscription : 40 € par jour, 70 € pour l’ensemble du colloque.
Pour les doctorants et post-doctorants : 25 € par jour, 40 € pour l’ensemble du colloque.
Sous réserve d’acceptation des articles, le colloque fera l’objet d’une publication.
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