dimanche 7 août 2016

Gide et Présence Africaine

Passée il y a quelques années aux enchères, une lettre de Gide est actuellement proposée par la Galerie Thomas Vincent. Elle est adressée à Gaston Criel, poète et fondateur en 1938 du cercle « Pour la poésie », qui a été en 1945 le secrétaire d'André Gide. Paul Eluard l'avait présenté à Paulhan, qui l'avait recommandé à Gide. La lettre est non datée, mais la question de Gide : « L’adresse que j’inscris sur cette enveloppe, est-elle encore valable ? » indique toutefois qu'elle date d'après l'époque où Criel travaillait pour Gide.

Gide qui se fait encore une fois entremetteur, suggérant à Criel de rencontrer et de « guider un peu » un certain Moudio V. Eyoum, « chanteur nègre ». Eyoum Vincent Moudio est né à Douala, au Cameroun. Arrivé en France dans les années 30, il se produit dans les music-halls avec un spectacle mêlant histoires drôles, chansons pimentées et danses. Eyoum Moudio devient vite une figure du show-business, au sein d'un réseau influent.

« Eyoum Moudio qui connaissait sur le bout des doigts le Tout-Paris des Arts et des Lettres, nous apprit comment forcer, par exemple, la porte de l'appartement d'André Gide », se souvient Alioune Diop (20e Anniversaire : Mélanges: réflexions d’hommes de culture, Présence Africaine 1947-1967, Paris, Présence Africaine, 1969). C'est en grande partie grâce au réseau de Eyoum Moudio que Diop va créer la revue Présence Africaine en novembre 1947. Gide signera d'ailleurs l'avant-propos du premier numéro de cette revue.



Biskra : une exposition en septembre

Du 23 septembre 2016 au 22 janvier 2017, l'Institut du monde arabe consacrera une exposition à Biskra, reine du désert. Cette exposition présentera surtout des peintures et photographies, mais convoquera aussi d’autres champs de la création, parmi lesquels la littérature, et plus particulièrement celle de Gide.

Présentation de l'exposition :

Le projet est né de l’expérience vécue à Biskra par certains artistes de l’avant-garde européenne autour de 1900 : les textes que la ville a inspirés à André Gide comme L’Immoraliste ou Les Nourritures terrestres, le très célèbre Nu bleu, Souvenir de Biskra de Henri Matisse, et les musiques enregistrées dans les ksour par Béla Bartók qui ont fortement influencé ses compositions des années 1920.

Mais qu’était Biskra lors de la venue de ces artistes ? Une oasis pittoresque, station de tourisme d’hivernage pour les pulmonaires dotée de luxueux hôtels et qui, après l’Indépendance, est devenue une métropole de quelque 300 000 habitants et la capitale d’une wilaya. L’exposition propose de replacer les œuvres d’artistes, du Français Eugène Fromentin en 1848 à l’Algérien Chaouia Noureddine Tabhera en 2014, dans un contexte éclairé par des documents inédits ouvrant de nouvelles perspectives.

Le commissaire de l’exposition, Roger Benjamin, épaulé par des conseillers et historiens algériens propose une lecture postcoloniale des œuvres et des documents qui souligne la richesse des interconnexions entre les faits et leurs représentations. Cette lecture rend compte de la diversité des « héritiers » de cette histoire : les citoyens de Biskra et de la wilaya contemporaine, les immigrés biskris vivant en France, les anciens Biskris pied-noir (italiens, français, juifs), sans oublier le public qui éprouve un attrait certain pour la majesté de cette région du Sahara et de sa population.



Vidéo : Auguste et Marius MAURE, Photographes à Biskra
de Gilles Dupont, du blog Ils ont photographié Biskra