lundi 31 mai 2010

"Dans les traces de Gide en Russie"

Quinze écrivains et deux photographes embarquent à bord du Transsibérien à l'occasion de l'année de la Russie en France. "Dans les traces d'André Gide" promet-on. A voir à leur Retour...

"Patrick Deville, Géraldine Dunbar, Jean Echenoz, Mathias Enard, Dominique Fernandez, Sylvie Germain, Guy Goffette, Minh Tran, Huy, Maylis de Kerangal, Kris, Wilfried N’Sondé, Jean-Noël Pancrazi, Olivier Rolin, Danièle Sallenave, Eugène Savitskaya et les photographes Tadeusz Kluba et Ferrante Ferranti sont les invités de ce « Train des écrivains » qui les mène de Moscou à Vladivostok. Ils sont ainsi invités à suivre la prose de Blaise Cendrars et à rouler dans les traces d’André Gide." Plus d'information sur le site officiel France-Russie 2010.

Slogan

Nouveau slogan des publicités presse et tévé d'un assureur...

Gide et Bergson : incompréhension mutuelle ?

Gide et Bergson, dessins d'André Rouveyre

Dans les Entretiens avec Bergson de Jacques Chevalier (Plon, 1959), Gide n'apparaît qu'une fois, au détour d'une conversation sur Proust, mais de manière assez significative pour sinon mériter ce billet, du moins susciter quelques interrogations... Les rapprochements possibles entre Bergson et Gide sont connus, depuis la psychobiographie de Jean Delay jusqu'à André Gide romancier, de Pierre Lafille (Hachette 1954), en passant par Léon Pierre-Quint dans son étude de 1952 chez Stock et les nuances apportées par Régis Bastide dans son Anatomie (PUF, 1972) entre l'acte gratuit et la liberté bergsonienne.

Petite chronologie préalable attestée par le Journal de Gide : en juin 1908, Gide lit Bergson pendant « les heures à tuer » dans un wagon. Il note le 28 juillet 1908 : « Lecture de Bergson - que je n'ai pas poussée très loin (L'Évolution créatrice). Importance admirable de ce livre, par où peut s'échapper de nouveau la philosophie. »

La Petite Dame confirme dans ses Cahiers l'intérêt difficile : « On patauge dans Bergson » note-t-elle en août 1921.

En 1920, Gide et Bergson siègent avec Valéry, Barrès, Proust et d'autres dans le jury de la première bourse de littérature et poésie de la Fondation américaine pour la pensée et l'art français de Florence Blumenthal. Les rapports entre Bergson et Valéry (ne parlons pas « d'influence » du premier sur le second, niée par Valéry*) ont été assez nombreux et riches pour qu'un peu de cette estime passât dans les conversations entre Valéry et Gide. Par Thibaudet également, Gide en apprend davantage sur Bergson :

« Thibaudet sur le bergsonisme ; après avoir pris grand intérêt à la préface (intérêt d'autant plus vif que je ne connais à peu près rien de Bergson), je perds contact. Ce qui me déplaît dans la doctrine de Bergson, c'est tout ce que je pense déjà sans qu'il le dise, et tout ce qu'elle a de flatteur, de caressant même, pour l'esprit. Plus tard on croira découvrir partout son influence sur notre époque, simplement parce que lui-même est de son époque et qu'il cède sans cesse au mouvement. D'où son importance représentative. » (entrée du Journal du 1er mars 1924)

Voilà bien une critique gidienne... Comme avec Nietzsche, Gide ne trouve pas « des idées » chez Bergson mais d'une certaine manière s'y retrouve lui-même. Il est « bergsonien sans le savoir » comme il l'écrit dans le Voyage au Congo. C'est en cela qu'il est « gênant » comme il le dira aussi, mais sur un autre mode, de Freud. Gide insiste, mais... « Je tâche de pousser jusqu'au bout la lecture des Données immédiates ; j'ai bien du mal... » (entrée du Journal du 18 juillet 1927).

Gêne chez Gide, et « incompréhension » d'une nature bien différente chez Bergson si l'on en croit ce que note Jacques Chevalier au sortir d'un de ses Entretiens avec Bergson le 28 octobre 1929 :

« Proust, qui était apparenté à la famille de ma femme, fut en effet garçon d'honneur à mon mariage. Mais je le voyais très rarement, car il ne sortait que la nuit. Pourtant, un jour, comme je lui avais dit que le bruit m'empêchait de dormir, il m'apporta, en plein jour, deux petites boîtes précieuses, me dit-il, pour arrêter le bruit, et dont il faisait usage : des boules Quies, je crois. Mais cette manière de se fermer à tous les bruits extérieurs ne me plaisait pas, et je ne fis pas usage de ses petites boîtes... Proust, au surplus, me posait un problème plus incompréhensible encore que Gide... »


_______________________________

* Valéry exagère lorsqu'il confie n'avoir eu connaissance de la pensée de Bergson que par « ouï-dire » (Cahier XXIV) et pour « espacés » (Ibid.) qu'aient été leurs rapports, ils sont assez nombreux à partir de 1924 - Cahiers et correspondance le montrent bien. Valéry avouait par ailleurs n'avoir trouvé que trois « Hommes » à son entrée à l'Académie : Foch, Bergson et Picard. Son discours prononcé à la mort de Bergson en 1941 confirme d'ailleurs cette admiration.

mardi 25 mai 2010

Christian Beck, un curieux personnage

Akio Yoshii a la gentillesse de me signaler un ouvrage qui m'avait échappé :


Christian Beck, un curieux personnage
de Béatrice Szapiro, Arléa, mai 2010


Présentation de l'éditeur :

Christian Beck est né le 4 janvier 1879, en pays wallon, au sud de Liège : à Verviers. « Tu désirais la gloire par les lettres, ce seront les moqueries d’Alfred Jarry qui t’immortaliseront dans Gestes et opinions du docteur Faustroll sous les traits du grand singe Papion, qui n’avait de parole humaine que “Ha ! Ha !”… »

C’est par ces lignes que commence le portrait d’un homme étrange et attachant, père de Béatrix Beck, (prix Goncourt 1952 pour Léon Morin prêtre) arrière-grand-père de Béatrice Szapiro, qui nous raconte ici ce curieux personnage, écrivain, poète, philosophe, vagabond, au cœur d’une époque fascinante.

Christian Beck est né le 4 janvier 1879, en pays wallon, au sud de Liège : à Verviers. « Tu désirais la gloire par les lettres, ce seront les moqueries d’Alfred Jarry qui t’immortaliseront dans Gestes et opinions du docteur Faustroll sous les traits du grand singe Papion, qui n’avait de parole humaine que “Ha ! Ha !”… »

C’est par ces lignes que commence le portrait d’un homme étrange et attachant, père de Béatrix Beck, (prix Goncourt 1952 pour Léon Morin prêtre) arrière-grand-père de Béatrice Szapiro, qui nous raconte ici ce curieux personnage, écrivain, poète, philosophe, vagabond, au cœur d’une époque fascinante.

Très jeune il vient à Paris où deux poètes belges l’introduisent dans les cénacles littéraires. Il fait la connaissance d’Anatole France, Paul Claudel, Charles-Louis Philippe, et bientôt Colette. André Gide lui accorde son amitié, son attention. Alfred Jarry se moquera de lui – et le provoquera même en duel.

À dix-neuf ans, il tombe fou amoureux de Louise, la femme de Paul Gérardy, banquier, écrivain et poète. Louise passe pour la femme la plus belle de Liège. Ils vivront ensemble dix ans d’amour tourmenté et passionné.

Mais Christian Beck ne tient pas en place. La France vient de découvrir Henrik Ibsen, il part pour la Norvège.

Il enseignera ensuite le latin et le français à Samara, en Russie, où Gorki fut gazetier, et traverse l’immense pays pour rencontrer Tolstoi.

De retour en France, il tombe éperdument amoureux de Kathleen Spears, jeune Irlandaise installée en Bretagne : le 30 juillet 1914, Béatrix Beck naît de cette union.

C’est la tuberculose qui l’emportera : il avait trente-sept ans.

Prix : 16 euros

120 pages, 2010, EAN 9782869598881


A signaler qu'à l'occasion de la sortie de ce livre, le Centre Wallonie-Bruxelles et la Société des Gens de Lettres présentent « Beck de père en filles : une filiation littéraire », deux soirées inédites : l’une le 25 mai au CWB et l’autre le 27 mai à la Société des Gens de Lettres. Plus d'information ici.

lundi 24 mai 2010

Histoire de Pierrette

Les éditions Fata Morgana publient un nouveau petit recueil de textes de Gide : l'Histoire de Pierrette, avec une postface de Pierre Masson.


Présentation de l'éditeur :
Histoire de Pierrette
Postface de Pierre Masson.
Fascicule supplémentaire de huit pages.
2010, 40 pages, 11 x 16,5 cm, ISBN 978.2.85194.763.5
J’assiste à l’envahissement par la folie du pauvre cerveau de Pierrette. Hier, lorsque je descends pour le breakfast, j’ai la stupeur de trouver la grande table mise (vous savez que je prends mes repas solitaires sur une petite table, près de la fenêtre), avec six couverts préparés. J’ai d’abord cru que G. ou M. étaient venus me surprendre au petit matin, et déjà je m’amusais beaucoup, ne parvenant pas à comprendre quels convives ils m’amenaient…
Gide entreprend, en 1921, de noter les progrès de la maladie de la persécution chez sa femme de ménage. La Petite Dame écrira en juin de la même année : «Gide a noté des histoires inouïes, dont il me fait le récit ; chaque jour, il a une heure de conversation avec elle, ce qu’il appelle une cure de conversation. Il a la preuve qu’elle détient dans sa chambre un revolver chargé». En nous racontant la folie de Pierrette, Gide ne nous raconte pas seulement une histoire vraie, il nous rappelle aussi discrètement le bon usage des fictions.
* 3 exemplaires nominatifs sur vélin Amatruda (indisponible).
* 30 exemplaires numérotés sur Arches (48 euros).
* 300 exemplaires sur vélin (9 euros).

vendredi 14 mai 2010

Sous des bouquets d'enfants

Funérailles d'André Gide à Cuverville
(photographie parue dans Paris Normandie le 23 février 51)


Un morceau d'anthologie, ce compte-rendu des obsèques de Gide paru dans Paris-Normandie - édition du Havre - n° 1995 du 23 février 1951, sous la plume de Jehan Le Povremoyne. Un texte formidable, comme on n'en fait plus. Qui prête à sourire, parfois.

On cherchera ainsi en vain "L'Imposteur" dans la bibliographie de Gide. Vaine aussi sera la recherche des voix qui s'élevèrent contre la présence du pasteur et de ses "invocations" : celle timide de Catherine, celle plus outragée de Roger Martin du Gard qui s'en prend violemment à Dominique Drouin, celle de Jean Schlumberger...

"Un enterrement de châtelain", résumera Léautaud qui assistait à la cérémonie avec les Gallimard, Jean Delay, Maïène Copeau, Heyd, Mme de Lestrange...

On s'amusera du "Vanneau" qualifié d'appartement "de célibataire" (les guillemets sont les bienvenus) et de l'opposition joliment trouvée entre les couronnes "tressées à Paris des plus belles corolles" et les bouquets de fleurs des bois des enfants du village. Qui deviennent par un raccourci final et freudien "des bouquets d'enfants" sous lesquels Gide repose à Cuverville-en-Caux (Seine-Inf.).

C'est surtout l'insistance poétique à chanter la terre cauchoise qui frappe au point de se demander si le journaliste n'était pas payé au mot... Ce journaliste au pseudonyme imagé, Jehan Le Povremoyne, s'appelle en réalité Eugène Coquin, ce qui n'est pas mal non plus. Né au Havre en 1903, journaliste à Havre Eclair puis à Paris-Normandie jusqu'à sa retraite en 1968, Eugène Coquin est aussi l'auteur sous son pseudonyme de plusieurs livres à la gloire du Pays de Caux.

Maire de Robertot de la Libération jusqu'en 1970, il se donne la mort cette année-là, au Tréport. En hommage, un collège de Saint-Valéry-en-Caux porte son nom. "Ce sont mes grands-parents qui m'ont appris ce que je sais de mon bien aimé Pays de Caux, des choses qu'on n'apprend pas dans les livres", a écrit Jehan Le Povremoyne. Si l'on vient un jour à publier de nouveau ses œuvres, il ne faudrait pas omettre le texte que le chantre cauchois écrivit en février 1951 :


André Gide a eu les humbles obsèques des hommes de la terre.

Sur sa tombe chaque écolier jeta un bouquet fait de fleurs des bois.

Par Jehan Le Povremoyne.

Jeudi 22 février 1951. Les mémorialistes noteront à cette date : Obsèques, à Cuverville-en-Caux (Seine-Inf.) d'André Gide, écrivain, docteur ès-lettres de l'Université d'Oxford, Prix Nobel de Littérature, auteur des « Nourritures Terrestres », de « L'Immoraliste », de « L'Imposteur », de « Si le grain ne meurt », de « La Porte Etroite », de « La Symphonie Pastorale », etc..., etc...

Et plus d'un, disions-nous hier, viendra se recueillir sur sa tombe.

...Sa tombe, dans cette fin d'après-midi d'hiver, s'est refermée sur son simple cercueil de chêne verni, bardé de quatre ferrures noires. Sur le couvercle aux clous cruciés, une plaque d'argent où, d'une belle anglaise, le graveur a transcrit :

André Gide

(1869-1951)

Les six fossoyeurs en pardessus (il faisait froid) qui descendaient la bière au fond de la fosse avec les cordeaux de chanvre, s'y sont repris à deux fois.

- Par les pieds d'abord, a dit celui qui commandait la manœuvre.

- Faut le remonter, a dit un autre...


Funérailles d'André Gide à Cuverville
(photographie parue dans Paris Normandie le 23 février 51)


La glaise dans cette ruée de pluie et de neige fondue, malgré les planches qui « étanchonnaient » le trou, menaçaient de crouler et les bois gênaient la dépose. Nous étions là une vingtaine de vivants à regarder. Les yeux embués - la peine était vive - on se sentaient les témoins d'une minute d'Histoire. Obsèques nationales, Panthéon, tribune d'honneur, discours, André Gide est parti sans cet orgueil et ces fastes. Il a eu l'enterrement paysan que, peut-être, il avait rêvé, qui sait ?

« D'autres en auraient pu faire, mais l'histoire que je raconte ici, j'ai mis toute ma force à la vivre... »

Ainsi débute le Chapitre 1er de « La Porte Etroite » qui est, d'André Gide, son mémorial de Cuverville-en-Caux.

Pourquoi chercher à n'être point aussi simple comme lui ?

A 10h, le fourgon mortuaire quittait Paris, la rue Vanneau [sic] où il est mort dans son petit appartement de « célibataire », parmi les livres et les objets d'art qu'il aimait.

Six ou sept membres de sa famille accompagnaient le cercueil, fleuri de gerbes et de couronnes - Comédie Française, Société des Auteurs et Compositeurs, Gens de Lettres, amis, proches parents.

Les violettes endeuillées, les œillets pourpres, les lilas blans [sic], les tulipes mauves enserraient le drap noir lamé d'argent.

Quatre heures durant, par la vallée de Seine, Rouen, Yvetot, Goderville, Criquetot, André Gide en son linceul - André Gide anonyme sur la route - a suivi le chemin qui le ramenait au pays de l'adolescence et de l'amour du cœur.

La grand-porte du château - de la maison, disait-il - la grand-porte de la maison, au perron de trois marches, s'est ouverte.

Jamais, peut-être, autour de la pelouse où les perce-neige et les crocus ont fleuri dans l'herbe mouillée, sous le dais prodigieux du cèdre trois fois séculaire, autant de personnes ne s'étaient et tenues ainsi, roides et tristes...

Seul jetait une touche hardie le drapeau tricolore des Anciens Combattants, porté par un mutilé, entouré des conseillers de la commune.

Le cercueil, tiré du fourgon, les fleurs portées dans des bras inhabitués, franchit la porte.

Le hall le vit passer sous les yeux d'un joli portrait de jeune fille, puis un salon plus sombre, puis, entre deux hautes fenêtres tendues de rideaux blancs aux fleurs brodées, cet autre salon - fin XVIIIe aux Savonneries discrètes - entre une console Empire et la cheminée de marbre...

Aux deux rangs des fauteuils, les familiers prirent place, sans s'asseoir. Trois ou quatre rangs noirs s'encastrèrent derrière eux et l'on ne vit plus que ce brancard de bois qui supportait la bière et les couronnes dont une, plus grande que toutes, barrée de violet, où brillait d'or une ligne indéchiffrable, pour mieux garder, sans doute, son secret...

Dans la pénombre se dessina la silhouette du Pasteur venu du Havre - pourquoi ai-je songé au pasteur Vautier de la Porte Etroite, du Havre lui aussi ? La voix grave qui déjà priait imposa le silence.

- L'herbe meurt et les fleurs avec elle. Notre Père, qui êtes aux cieux...

Les versets de l'Ecriture se succédaient emmenant les âmes au-delà des murs...

- S'il vous plaît...

Le maître de cérémonie, la liturgie achevée, priait que l'on sortît.

Deux hommes s'avancèrent, indécis, embarrassés.

C'étaient deux des fermiers d'André Gide, désignés avec le fidèle Gilbert, le chauffeur, pour porter le mort.

- Passe la bretelle, dit le premier à son camarade.

Et comme son chapeau le gênait, le second le déposa sans plus de manière sur le cercueil.

Une tulipe gisait au pied du brancard... Je l'ai regardée longtemps comme si la main invisible et présente avait dit adieu à la maison.

Car c'était bien l'adieu.

Par le petit chemin qui traverse la ferme et coule sous la hêtraie, par la route de cailloux, de boue et d'herbe, descendant et montant, tournant rude au coin de la haie d'une chaumière et qui pique par la plaine - une charrue de-ci, une herse de-là - le cortège s'en fut, cahin-caha, lent et long, vers le village.

Près d'un kilomètre dans les terres, près d'un kilomètre dans les horizons qu'il connaissait et contre ce fossé de ferme qui mène à l'église.

Point de glas... Point de psalmodies... Le vent... Le vent seul et la boue dans les ornières et le petit sentier de l'abside.

Dans l'angle de la haie, sous la branche du pommier qui, de la cour du presbytère s'allonge vers les tombes, la centaine d'assistants entourent maintenant d'un bloc la fosse où le cercueil, posé sur deux madriers, attend l'ultime au revoir...

Le pasteur, sous le drapeau, la famille, les intimes, le Conseil Municipal, les amis, et quasi tout le village.

Ici et là, derrière les croix ou sur les fossés, les photographes et les cinéastes...

A nouveau, dans le recueillement des âmes, la prière tremble qui demande qui demande la paix et commande l'espérance.

Le ciel blanc et bleu de l'hiver cauchois, les pommiers dépouillés, les haies rouillées, les ifs et les sapins du cimetière, le clocher d'ardoises luisantes et les chaumes entrevus sous les hêtres, passent dans la symphonie que, tout bas, tout bas, ce terroir chante à celui qui s'en était évadé pour de lointains voyages, mais ne pouvait l'oublier !

Une voix entrecoupée de larmes, dès après la dernière invocation du pasteur, ne put se contenir.

C'était l'un des neveux d'André Gide, M. Dominique Drouin qui, près de la tombe de son oncle, simplement, du fond de son cœur, au nom de toute la famille et des amis, ceux qui étaient venus.

- Son cœur était là !

Et la voix égrenait les noms des gens du village, les fermiers, les locataires, les conseillers, les amis du pays fidèle...

Alors, un à un, les enfants de l'école se détachèrent de la foule et sur le cercueil, entre les grandes couronnes tressées à Paris des plus belles corolles, ils déposèrent, se courbant comme on saluait jadis, d'humbles tout petits bouquets de primevères, de violettes des bois et de perce-neige serrées dans quatre brins de mousse, de feuilles de lierre et de branchettes vives.

Oui, c'est ainsi qu'André Gide, en son village de Cuverville-en-Caux, Seine-Inférieure, est descendu en terre sous des bouquets d'enfants...

Jehan Le Povremoyne (1903-1970),
de son vrai nom Eugène Coquin,

journaliste, maire de Robertot
et chantre du pays cauchois

lundi 10 mai 2010

Autour du Voyage au Congo

Du 1er au 5 mai dernier, l'artiste australien Adam Geczy a investi Croxhapox (lieu expérimental pour l'art contemporain à Gand en Belgique) avec une performance autour du Voyage au Congo intitulée « Remember to Forget the Congo ».


Après avoir recouvert de peinture noire les murs de la pièce, Adam Geczy a recopié l'intégralité du texte du Voyage au Congo à la peinture blanche, jouant de la hauteur des lettres et des superpositions pour mettre en perspective ce texte : perspective plastique et portée toujours actuelle selon l'artiste.



Les cinq jours de cette performance et sa préparation sont retracés sur le blog Remember to Forget the Congo, des photos sont à voir sur la page Flickr de Croxhapox et sur le site Croxhapox.

Le Petit Van Rysselberghe


Une bonne idée que ce « Le Petit Van Rysselberghe », n°14 de la collection « Happy Museum ! » des éditions Kate'Art. Destinée aux enfants, cette petite collection est consacrée à la découverte de peintres (Ensor, Turner, Bruegel, Knopff...) ou de styles (l'art nouveau...). On croise dans celui-ci Verhaeren et Gide, on aborde le pointillisme, le tout dans une plus large découverte de "la Belle Epoque".


Présentation de l'éditeur :

Le Petit Van Rysselberghe. Un voyage interactif au temps de la Belle Époque. Auteur : Catherine de Duve. 32 p., Quadri, plus de 60 illustrations couleurs, 16 x 22,50 cm. N°14, collection « Happy Museum ! ». La première collection de livres d’art pour toute la famille. Prix : 9.95 €

Première mondiale ! Premier livre jeunesse consacré au peintre.

En route avec le peintre Théo Van Rysselberghe.

Découvre avec lui la grande Fantasia arabe au Maroc.

Que dirais-tu d’une balade sur la plage ?

Rencontre à paris les célèbres amis du peintre.

Qui sont-ils ? Artistes, peintres et écrivains.

Observe point par point les tableaux de Théo.

Et découvre la technique du pointillisme !

Prends le thé au jardin.

Visite l’aquarium aux couleurs féeriques !

Un livre interactif pour découvrir l’art en s’amusant !

À jouer et créer !

mercredi 5 mai 2010

Nouvelle vie, nouveau blog

Les éditions du Seuil viennent de publier un essai de Jean-Pierre Martin intitulé Eloge de l'apostat. Sur la "vita nova".

"Ce livre, qui prend sa source dans l’expérience personnelle de l’auteur, envisage l’aventure des écrivains qui ont osé réinventer leur vie, voire en essayer plusieurs. Ce fut le cas en particulier pour Rousseau, Barthes, Duras, Gary, Koestler, Gide, Vailland, Sartre, Nizan, Semprun, Leiris…Le «devenir autre» fut pour eux un défi, une nécessité tout à la fois éthique, esthétique et existentielle." (extrait de la présentation de l'éditeur)

Le Point en fait une critique alléchante ici.

L'actualité gidienne a toutefois considérablement ralenti depuis la fin des festivités NRF et plusieurs billets inactuels que je comptais donner ici restent - pour l'instant - en cale-sèche. Je profite donc de ce ralentissement pour mettre en ligne un autre blog que j'avais en projet depuis longtemps : imaGide.

A partir des images accumulées depuis longtemps (portraits photographiques, couvertures de livres, dessins et peintures, documents divers...) que ce nouveau blog me permet de partager, ce projet a aussi pour vocation de donner une chronologie, sinon une bio-biblio-graphie, accessible par les libellés par année. Les notes sommaires en légende aux images s'accompagnent aussi de liens.