vendredi 8 août 2008

Ereintements I : Henri Béraud

(J'entame aujourd'hui sous le titre "Ereintements" une recension des critiques faites à Gide.)

Années 20 : deux critiques mènent principalement campagne contre Gide : Henri Beraud et Henri Massis.

Béraud a tout d'abord aimé Saül. Mais avec les Nourritures Terrestres, l'Immoraliste, Les Caves et bientôt Corydon, tout se gâte. Béraud se lance contre la "Croisade des longues figures", titre d'un recueil des articles pamphletaires* qui paraît en 24, visant Claudel, Gide et Romains, ces auteurs français trop exportés selon son goût et qui donnent une si piètre image de la littérature française...

Il reproche notamment à Gide d'utiliser un style d'apparence classique uniquement par hypocrisie, pour mieux diffuser ses idées subversives – Béraud a horreur, en littérature, des idées. Un style où il relève maintes fautes (une manie, un côté pion qu'il a en commun avec Gide) Mais très vite Béraud s'en prend à tous les "gidards de la giderie" : la NRF vue comme une franc-maçonnerie, comme la voient les théoriciens du complot s'entend.

Béraud joue grassement sur le chapitre des moeurs de Gide : "M. Gide, André pour les garçons"... Et lorsque Léon Daudet, dans l'Action Française elle-même, vient prendre étonnamment en 1923 la défense de Gide et de la NRF contre Massis, ce dernier a beau jeu de détourner les compliments de Daudet qui voit en Gide un écrivain "terrible et pénétrant"...

La bassesse des attaques le disqualifie. "Violente attaque (dans les Nouvelles Littéraires) de Henri Béraud, auteur du Triomphe de l'obèse** – qui ne me pardonne pas ma maigreur. Très divertissant. – Tout de même les articles de Massis étaient d'une autre encre; celui-ci me fait l'effet d'un idiot." (Journal). Gide ne sera pas le seul à penser ainsi, d'autant que ceux qui se rangent du côté du pourfendeur des longues figures de la NRF sont presque tous des auteurs blackboulés par la NRF...

Le goût du pamphlet poussé à l'extrême, de l'extrême gauche à l'extrême droite, du Canard enchaîné à Gringoire, lui vaudra une condamnation à mort à la Libération. Camus et Mauriac prennent sa défense, de Gaulle le gracie : il n'y a dans son dossier aucune trace d'intelligence avec l'ennemi. Aucune trace d'intelligence tout court, chez Béraud ? Pierre Assouline fait ici très bien le point sur le cas Béraud.

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* On retrouve ici une vingtaine d'articles de Béraud dans les Archives Gidiennes
** Le titre exact est le Martyre de l'obèse.

1 commentaire:

Connaissance ouverte a dit…

Massis prendra la défense de Gide contre les attaques stupides de Guillemein.