« La complexe personnalité de Gide sera d'autant plus difficile à cerner, que, depuis bien longtemps, tout ce qu'il écrit dans ses carnets, voire dans ses lettres, c'est avec la hantise du jugement qui, « à l'advenir », sera porté sur lui. Tout est plus ou moins intentionnel – et même dans les contradictions. Tout concourt à tracer de lui un portrait en pied, non seulement de l'homme qu'il est (et qu'il s'applique à découvrir, à comprendre et à décrire loyalement), mais de l'homme qu'il croit être, qu'il s'efforce d'être, et qu'il voudrait qu'on pense qu'il a été. Dès qu'il s'est humblement accusé d'une faiblesse, d'un vice de caractère ou d'une faute, il ne résiste pas souvent à la tentation de se disculper aussitôt à l'aide d'explications subtiles. (Que celui qui n'a jamais péché ainsi lui jette la première pierre !)
Il reste que jamais aucun auteur de « Confessions » n'aura mis plus d'astucieuse sincérité à modeler d'avance sa statue, et à en établir solidement le socle... »
(Roger Martin du Gard, Notes sur André Gide,
Gallimard, 1951)
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